« Liaisons » de C. Longchamp, ou Charles le peintre fantasque

livre érotique rare et numéroté

Une fois n'est pas coutume (mais ce ne sera pas non plus la seule, soyons honnête), c'est aujourd'hui un roman qui va nous intéresser. Pas d'illustrations, donc pas de dessins, pas d'images. Mais du texte, rien que du texte. Du texte érotique cependant, évidemment. Ce roman s'intitule Liaisons, signé d'un certain C. Longchamp. Le livre est publié sans date aux éditions Intimité, prétendument sises à Espalion, dans l'Aveyron.

Liaisons : un roman érotique

Un livre mystérieux 

Je dis « prétendument » car je ne sais pas le crédit qu'il faut apporter à ces informations. C. Longchamp est-il le vrai nom de l'auteur ? Difficile à dire, tant ce nom est ordinaire sans prénom. L'ouvrage est référencé dans le catalogue général de la Bibliothèque nationale de France, où le nom de l'auteur est indiqué comme étant un pseudonyme. Cela me paraît très probable.
Toujours dans ce catalogue, un deuxième ouvrage du même éditeur est référencé, là encore sans date et sous pseudonyme : Onze contes pour personnes peu sages, de L. Houzel. Quant à ce dernier, j'ai trouvé une date sur internet : 30 janvier 1964. Je ne saurais dire si elle est authentique, mais elle paraît à tout le moins crédible, car le site semble sérieux et dans Liaisons, certainement publié vers la même époque, il est fait à deux reprises mention de Brigitte Bardot. Disons donc simplement que ce serait cohérent.
Aucun de ces deux titres n'est mentionné par Pia dans son Dictionnaire des œuvres érotiques paru en 1971. Peut-être Dutel les référence-t-il dans sa Bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement entre 1920 et 1970 ? Si l'un d'entre vous possède ce volume, qu'il n'hésite pas à nous le dire.
Liaisons fut, d'après la justification du tirage, imprimé à 500 exemplaires. Une édition, est-il précisé, « strictement privée et hors commerce » destinée à « un groupe d'amateurs ». (Il en est a priori de même pour les Onze contes.) Mon exemplaire porte le n°219.

Un curiosa érotique numéroté

Du point de vue physique, l'ouvrage mesure 14 x 18 cm et se présente sous une couverture souple et sobre, sans illustration. Le papier intérieur est un bouffant commun. La mise en page enfin est propre et aérée, avec des marges confortables. 

Un roman pornographique

L'histoire du grand Charles et de son vigoureux braquemart

Qu'en est-il du texte, me direz-vous à juste titre ? Car enfin un livre, même mystérieux, reste un livre. Et un livre se lit, même d'une seule main. Laissons l'auteur commencer lui-même son histoire :
« Charles était peintre. Artiste peintre. Peintre abstrait. Cela lui facilitait les choses. Car Charles était un grand coureur de filles et la peinture, ses séances de poses, recouvraient ses parties de cuissage d'un voile artistique.
Oui, un peintre peut proposer à brûle-pourpoint à une jolie fille de poser pour lui, ce que le commun des mortels ne saurait demander sans passer pour un goujat. 
(…)
Charles était peintre et le « petit Charles » son braquemart était un grand bandeur devant l'Eternel. Les deux Charles faisaient très bon ménage. »
Le ton est donné. Et nous suivons au fil du texte les aventures pornographico-artistiques de ce fameux Charles Sigriss, sur une journée. Une journée diablement remplie, où notre héros, après avoir dépucelé une (très) jeune fille et s'être joyeusement dégourdi avec une amie, convoque une dizaine de jeunes prostituées pour stimuler son inspiration. Heureusement sauvé in extremis par son ami le vicomte de la Malvie qui parvient d'un habile coup de langue à redresser le « petit Charles » tombé d'épuisement (car il est dit que le peintre mourra lorsqu'il ne pourra plus bander), notre vigoureux peintre peut enfin se mettre à son art et achever son œuvre du jour. Ceci fait, il s'empresse de congédier cette heureuse compagnie car il doit se rendre chez la duchesse Eléonore de Hanska, sa mécène et maîtresse, qui l'attend pour son orgie hebdomadaire...

Un roman généreux dédié aux plaisirs de la vie

Dans ce livre, on en trouve donc pour tous les goûts : initiation de la jeune fille, amour à deux, à trois, homosexualité (surtout entre femmes, avouons-le) et amour à plusieurs. On y goûte aussi un peu d'urologie (mais pas de SM). Ce qui ressort de tout cela, c'est surtout de l'humour, de la dérision et un goût du fantasque et des plaisirs de la vie (bonne chère, alcool et drogues, mais dans une ambiance joyeuse). Ce qui est amusant aussi, c'est cette inclination au vieux monde (nous avons un vicomte, une duchesse) mêlée à un langage qui n'est pas du tout XIXsiècle, mais très actuel (les années 60 en ce sens nous paraissent être une date très crédible).
En conclusion, je dirai que Liaisons n'est certes pas une œuvre majeure méconnue de la littérature érotique (rien à voir avec Histoire d'O, par exemple, ou L'image de Jean de Berg), mais il demeure un roman gai et joyeux, bien mené, qui se lit avec un plaisir amusé. Nous ne sommes pas dans la littérature de sex-shop, le matériel purement pornographique, mais plutôt dans la gaudriole, le texte léger et bon vivant qui ne prétend à rien d'autre qu'à divertir et titiller agréablement son lecteur. Un bon moment ! 

Informations complémentaires 

ISBN : aucun
Format : 14 x 18 cm
Nombre de pages : 189
Prix moyen d'occasion :  80 € (rare)

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