Quand Pichard se paie les « Trois filles de leur mère » de Pierre Louÿs
Voici
un grand classique de la littérature érotique : Trois
filles de leur mère de Pierre Louÿs, ici illustré par un
maître de la bande dessinée pour adultes : Georges Pichard.
L'édition que je possède est celle de Jean Antoine, parue en 1983.
C'est le deuxième volume de la collection « Les Enfers
illustrés » : le premier reprenait les Mémoires d'une
chanteuse allemande, également illustré par Georges Pichard. En
fait, ces deux livres sont des rééditions des mêmes titres publiés
par les éditions L'Hérésiarque, en 1978 pour les Mémoires
et en 1980 pour les Trois filles.
Du bel ouvrage
L'ouvrage
est un format type bande dessinée (24,5 x 32 cm),
apparemment plus petit que celui de L'Hérésiarque (30 X 42 cm :
ça commence à devenir encombrant !). Sous une jaquette blanche
illustrée, la couverture rigide et toilée affiche son titre en
lettres dorées. Chose étrange, ma couverture est rouge, alors
qu'elle semble être bleue sur d'autres exemplaires : un mystère
que je voudrais bien éclaircir !
L'ouvrage s'ouvre et se ferme
par deux illustrations pleine page sur un fond violet, et compte
209 pages.
Un texte sans détours
Le
roman de Pierre Louÿs est sans conteste un des chefs-d’œuvre de
ce genre de littérature. Rédigé vers 1910, il ne sera publié
qu'en 1926, clandestinement, après la mort de l'auteur. L'histoire
est celle d'un jeune homme (M. X) qui, rencontrant une jeune
fille (Mauricette), fait bientôt la connaissance de ses deux sœurs
(Lili et Charlotte), ainsi que de leur mère, Teresa, toutes
prostituées aguerries. De sorte que quand je dis « fait la
connaissance », je parle bien entendu d'une connaissance
approfondie. Les quatre femmes se montrent en effet toutes plus
délurées les unes que les autres et notre héros, bien que parfois
un tantinet désemparé, ne se laisse pas abattre. Il reçoit ainsi
une à une ces quatre femmes, avant l'orgie finale surjouée destinée
au dépucelage de l'une des filles.
Le
texte va très loin dans la pornographie et ne s'embarrasse pas de
métaphores et autres circonvolutions. Ici, on appelle un chat un
chat, un cul un cul, et le langage ne se drape pas dans la pudeur. Et
pourtant, la qualité stylistique du récit, son naturel, la justesse
des dialogues et le regard amusé du narrateur en font quelque chose
de joyeux, presque léger. On est loin du glauque et du plaisir pris
au malsain pour lui-même.
Enfin,
dans la catégorie « radio ragot », il paraîtrait que ce
livre s'inspirerait des relations tumultueuses de Pierre Louÿs avec
la famille de l'écrivain Hérédia, dont il a épousé l'une des
filles – mais personnellement je n'en sais rien, et comme diraient
certains : « cela ne nous regarde pas ».
Pichard, un maître généreux
Côté
illustrations, c'est donc Georges Pichard qui fut à l'œuvre. Né en
1920 et mort en 2003, il est un auteur et illustrateur incontournable
de la BD érotique et pornographique française (Ténébrax,
Paulette, Blanche
Epiphanie, Marie-Gabrielle
de Saint-Eutrope, entre autres).
Ses dessins présentent des femmes aux formes affirmées, affichant
des poitrines lourdes et conquérantes et des hanches généreuses.
Les bouches sont voluptueuses et les yeux volontiers en amande. L'ambiance Années folles est joliment restituée ici, notamment à
travers les costumes et les objets. On y trouve par ailleurs
plusieurs scènes sadomasochistes qui, dans mon souvenir, ne se
trouvent pas (du moins à ce point) dans le texte de Pierre Louÿs,
mais qui ne sont pas pour me déplaire.
L'ouvrage
est richement illustré. Outre les très nombreux dessins en pleine
page (j'en ai compté plus d'une cinquantaine), on y trouve
frontispice, culs-de-lampe, bandeaux et de chouettes lettrines à
chaque début de chapitre.
Quelques bandeaux :
Quelques culs-de-lampe :
Quelques lettrines :
Bref,
voilà un ouvrage à ne certes pas mettre entre toutes les mains,
mais qu'il est bon d'avoir dans les siennes !
Informations complémentaires
ISBN :
aucun
Format :
24,5 X 32 cm
Nombre
de pages : 209
Prix
moyen d'occasion : 50 €
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