La Nouvelle Justine de Sade vue par Gilbert Garnon
Le
livre dont je veux parler aujourd'hui est une bande dessinée, ou
plus précisément une adaptation graphique d'un roman du marquis de
Sade : La Nouvelle Justine.
Cette adaptation fut publiée pour la première fois en 1979 (dépôt
légal effectué au 3e trimestre),
par les éditions Borderie dont je ne reparlerai pas ici, puisque je
l'ai fait dans l'article sur les aquarelles de Peter Fendi.
Un bel objet
Le volume que je possède est celui à couverture rigide, couverte
d'une toile noire et ornée en son centre d'une vignette collée
présentant le titre de l'ouvrage, l'auteur du texte (Sade), celui
des illustrations (Gilbert Garnon) et le préfacier (Alain
Robbe-Grillet). Il s'agit d'un grand volume (34,5 x 25 cm)
de 101 pages, imprimé en noir et blanc sur un joli papier
verger crème. L'ensemble du texte (même la préface) est en
écriture manuscrite, à l'exception de l'achevé d'imprimer. Il a
été tiré de cet ouvrage 99 exemplaires sur Arches, numérotés
et accompagnés d'un dessin original de Gilbert Garnon, puis le
tirage courant (le mien). Une autre édition, à ma connaissance, en
a aussi été réalisée, la même année, toujours par les éditions
Borderie, avec une couverture souple et une reliure brochée. Il
semble que cette édition porte le même numéro ISBN.
Une histoire de sadomasochisme
On
connaît tous – au moins de nom – le marquis de Sade, et je
n'étonnerai personne en affirmant que nous sommes là dans le BDSM
le plus extrême et le plus sanguinolent. La Nouvelle
Justine est la troisième et
dernière version de Justine, ou les malheurs de la vertu.
Cette version parut pour la première fois entre 1799 et 1800, en dix
volumes agrémentés de gravures (gravures que j'aurai le plaisir de
vous présenter dans un prochain article). Pour résumer en quelques
mots l'histoire de Justine,
il s'agit d'une jeune fille éperdument attachée à la vertu, qui
sera continuellement maltraitée par divers personnages éperdument
attachées, eux, aux vices et à la lubricité. Au fil du roman,
Justine est ainsi retenue prisonnière dans diverses demeures (dont
un couvent, bien sûr) où elle assiste aux pires scènes de violence
et de perversité et subit sans fin les outrages les plus extrêmes.
L'adaptation que nous offrent ici Garnon et les éditions Borderie condense le roman en reprenant les scènes essentielles. Et s'il s'agit bien entendu d'un récit extrêmement raccourci comparé au texte original, l'histoire est fluide à la lecture et retrace bien, pour ce dont je me souviens, celle du marquis de Sade. D'ailleurs, sauf erreur de ma part (ma lecture de Sade est ancienne), le texte est intégralement extrait du livre original.
Un mystérieux dessinateur : Gilbert Garnon
Je
ne sais pas grand-chose de Gilbert Garnon, l'illustrateur, sinon
qu'il a aussi adapté le Gamiani
de Musset (toujours aux éditions Borderie), réalisé des images
pour La Jeunesse d'Alexandre de
Roger Peyrefitte (éditions La Vue), et fait l'objet d'un volume
dans la collection « Images obliques » :
132 positions
amoureuses
(éditions Borderie). En fait, je n'en sais rien d'autre, même pas
sa date de naissance...
Des dessins secs, précis, et d'une richesse remarquable !
Toujours est-il qu'il nous offre ici de superbes dessins, que je
qualifierai de secs, précis, et en même temps extrêmement riches
et foisonnants.
Justine
se présente sous la forme d'une jeune fille menue, aux traits fins et aux cheveux coupés assez courts. (Je ne me souviens pas si Sade en donne ou non une description physique précise dans son texte.) Ses seins sont fermes et ronds et ses fesses heureusement rebondies.
Les femmes sont
souvent corsetée, la poitrine exposée, un peu à la manière des
robes de Roissy dans Histoire d'O. Les hommes quant à eux affichent des attributs solides et
conquérants, et se promènent volontiers la braguette ouverte.
Les moines ont pour eux des visages plus tortueux, malsains, marquant
ainsi leur caractère libidineux.
Bien sûr, les verges ne manquent pas, et les lacérations qu'elles
provoquent sur les chairs sont clairement exprimées. Avec en outre un sens du détail qui ne manque pas d'amuser...
On trouve également dans ce livre de superbes planches en pleine
page, ainsi qu'une en double page.
Enfin,
l'atmosphère du récit sadien est très bien respectée, tout en
restant dans le domaine de l'imaginaire, du fantasque outrancier.
Ainsi, même les pires atrocités décrites par le marquis dans sa
Nouvelle Juliette
peuvent être vues sans haut-le-cœur, bien que la violence en soit
scrupuleusement rendue.
Bref, voici un bel ouvrage qui mérite bien le détour !
Informations complémentaires :
ISBN : 2-86380-008-6Format : 34,5 x 25 cm
Nombre de pages : 101
Prix moyen d'occasion : 60 €
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